Les sulfites

Les sulfites

Sans sulfites, ça n’existe (presque) pas.

Les sulfites sont ajoutés au moût sous forme de sel, à raison de 160 à 400 mg par litre, le dioxyde de soufre, ou SO2 ou encore sulfite de son petit nom, est un antiseptique naturel inodore et sans saveur utilisé depuis très longtemps par les vignerons. Son efficacité antibactérienne et antioxydante incontestée se voit depuis plusieurs années mise en balance avec sa toxicité supposée et de nature allergène. Certains d’entre vous doivent probablement connaître les maux de tête et les nausées, qui seraient l’apanage des consommateurs «sensibles». Depuis peu c’est une catégorie à laquelle beaucoup s’identifient, et qui sert de rampe de lancement à tous les buzz existants sur les méfaits des sulfites. Aujourd’hui devenus des ennemis publics.

Et ça, ça a de quoi agacer Ramón Mira de Orduña Heidinger! Enseignant à Changins, ce citoyen du monde (hispano-allemand, étudiant new-yorkais) tient comme ligne d’enseignement de concilier vinification et limitation des sulfites, au nom des bonnes pratiques, mais «sans panique». Une voie tout en nuances qui l’incite à pourfendre nombre de postulats erronés, mais bien répandus dans le public.

PAS BESOIN DU VIN POUR PARLER DE SULFITES

C’est le terme de «vin sans sulfite» qui donne des maux de tête à Ramón Mira. « Les levures en produisent, en quantité variant de 20 mg/l à plus de 100 mg dans certains cas (…). » Ces quantités vont certes s’ajouter aux sulfites déjà présents dans l’organisme, car nous en avons déjà en nous chers amis! Le chercheur rappelle à ce propos que la métabolisation d’une bonne fondue produit pas loin de 1400 mg de SO2. Ça calme non? La petite fondue sur les pistes, sympa, dans la joie et au soleil sous l’oeil bienveillant du Cervin, entachée de sulfites!

Tout ça pour dire que les sulfites sont à la fois naturels et indispensables à l’organisme. Ça ne veut pas dire qu’ils soient anodins. C’est comme tout, plus c’est dangereux plus c’est excitant! La dose médiane létale du SO2 est d’environ 820 mg par kilo de poids corporel – en tout cas chez la souris… En tenant compte des concentrations normales de sulfites dans le vin, il faudrait en consommer presque 300 litres en une prise pour mettre sa vie en danger. Avis à celles et ceux qui souhaiteraient en finir, prévoyez large! Pour faire la comparaison, notre bon veil éthanol, qui reste le champion des toxiques du vin, est potentiellement mortel à partir d’une dose correspondant à 5 litres environ, seulement!

Le vrai problème qu’on peut relever avec les sulfites concerne un groupe limité de personnes: les asthmatiques, pour lesquels l’action irritante des sulfites, par inhalation (le nez dans son verre, par exemple), peut entraîner des difficultés respiratoires, d’une part, et les «personnes allergiques» d’autre part. Scientifiquement parlant, on entre là en terre inconnue: «Il y a très peu d’études et de chiffres fiables sur le sujet, et apparemment, personne ne tient à se lancer dans des tests», relève Ramón Mira. Qui n’en balaie pas pour autant toute allégation allant dans ce sens: «C’est bien pourquoi je suis favorable au principe de réduire autant que possible la teneur en un additif potentiellement irritant.»